Imbroglio entre les entrepreneurs de la musique sur le Web, la rue de Valois, l'Hadopi. L'argent ne vient plus et l'offre légale passe par pertes et fracas.
AlloMusic, MusicME, Jiwa... Combien encore de disparitions avant que les pouvoirs publics ne réagissent ? L'histoire actuelle est pleine de bruit et de fureur dès qu'il s'agit d'Internet. L'obsession de la rue de Valois sur Hadopi cache une misère de l'action gouvernementale. Deux nouveaux dossiers sont sur la table de la ministre de Culture et de la Communication. Deux dossiers qui vont précisément dans le sens de ces récentes déclarations : il faut développer l'offre légale, accroitre la diversité des plateformes, sauvegarde de l'exception culturelle etc. et pourtant ces deux requêtes sont restées lettres mortes depuis des mois.
Bien entendu, il ne faudrait pas accuser trop facilement un cabinet réuni autour d'Aurélie Filippetti qui vient à peine de prendre ses repères, juste après l'élection de mai dernier. La chronologie des faits plaide en faveur d'une gestion attentiste des dossiers aussi par les services de la DGMic ; véritable Etat dans l'Etat au sein du ministère de la Culture et de la Communication, qui n'a pas été affecté par le changement de majorité présidentielle. Laurence Franceschini, donnée sortante par la rumeur est bien toujours là à la direction, et les agents sont pour la plupart restés les mêmes.
Entre janvier et mars dernier, Starzik et Beezik présentent deux dossiers auprès des services du ministère après avoir consulté la Hadopi. Les deux plateformes françaises de musique en ligne demandent quelques centaines de milliers d'euros. 200 000 pour Starzik pour financer le développement d'une nouvelle plateforme intégrant le "Cloud" et consolider la campagne de communication et de marketing lors du lancement grand public. Beezik pour sa part fait appel à la puissance publique pour un peu moins de 50 000 euros. Beezik veut s'en servir pour traiter les fichiers WMA que les labels lui fournissent et qui sont truffés de DRM. La création d'une application à la Spotify est d'ailleurs dans les cartons. Rien de vraiment révolutionnaire, entre le Cloud et le player, mais au moins il s'agit d'aider les confettis du patriotisme économique sur le Web.
Ces deux sites sont parmi les derniers à tenter d'exister face aux Amazon, Apple, et bientôt Google Play. Starzik, qui génère 1 million d'euros de chiffre d'affaires par an, s'est diversifié proposant aussi des Applications, des jeux et de l'édition. La musique représente encore 60% de ses revenus, mais sans cette politique multi produits, la société serait dans de sales draps. Beezik est aujourd'hui adossé à eBuzzing, avec Pierre Chapaz en parrain fortuné.
Favoriser le développement de l'offre légal
L'argent n'est jamais arrivée. Les derniers rendez-vous entre les deux plateformes et les services de la DGMic et l'Hdaopi n'ont pas été suivi d'effets. Starzik a donc choisi de poursuivre le projet en financement propre, mais devra certainement rogner sur les dépenses de publicités. Et quant à Beezik, l'urgence est certainement moindre. Cette affaire déjà suffisamment sérieuse pour l'avenir de l'industrie musicale sur le Web, se double d'un volet cocasse. L'Hadopi a été sollicitée par Starzik - la plateforme répondait ainsi à l'appel lancé par la Hadopi après la constitution du label PuR dans la but de constituer un corpus d'actions supplémentaires pour développer l'offre légale. dans un cadre qui normalement aurait dû être celui du centre national de la musique. Celui-là même que la ministre a "assassiné" dernièrement dans un entretien au Monde. En l'absence de solution, Starzik s'est donc tourné vers l'Hadopi, sachant cependant que cette dernière a bien comme rôle dévolu par le législateur "favoriser le développement de l'offre légal", mais le texte qui devait lui permettre d'utiliser ses fonds pour aider les acteurs industriels avait été retoqué lors du vote de la loi. Présenté par Franck Riester, le rapporteur de la loi, il n'avait pas plu aux députés, dont la plupart étaient excédés par l'acharnement du gouvernement sur ce dossier.
Dans ce cadre inexistant, l'Hadopi n'a donc pas pu aider directement ces deux sociétés, qui bien naturellement ont été réorienté vers la DGMic. Ca n'aurait pas été une première pour la direction des médias, puisque Qobuzz avait déjà touché quelques dizaines de milliers d'euros issu d'un fonds d'aide. De sources proches des plateformes, devant la difficulté de sortir de l'argent, l'Hadopi aurait proposé à la DGMic de partager l'effort financier. La manoeuvre consistait à utiliser une partie du budget d'Hadopi, qui est versé par la DGMic, directement auprès de ces acteurs.
La direction des médias n'a pas été plus loin. Laissant l'Hadopi dans une situation peu confortable, et les plateformes le bec dans l'eau. Pourquoi la DGMic a agi ainsi ? En grande partie car les dossiers présentés n'ont pas rempli les critères nécessaires. Plusieurs point concernant les raisons de ce financement sont apparus comme trop imprécis pour la DGMic. Une explication qui ne satisfait évidemment pas les demandeurs, mais aujourd'hui la situation est bloquée.