Exception culturelle: soulagement des artistes, colère de Barroso

L'audiovisuel et la culture seront bien exclus des négociations pour un accord de libre échange avec les Etats-Unis a-t-on appris vendredi soir à l'issue d'un vote de Parlement européen. Les acteurs de la culture disent leur soulagement et leur joie tandis que Barroso joue les mauvais perdants...

Depuis mars, les joutes autour de l'exception culturelle, mise en danger par les velléités libre-échangistes d'une partie de la gouvernance Européenne, se sont multipliées. D'un côté les artistes et ayants-droits multipliaient les déclarations et pétitions pour préserver la souveraineté des pays dans ce domaine, de l'autre les Barroso ou De Gucht qui soutenaient que l'on s'effarouchait pour rien sous entendant à demi mots que la culture n'était finalement qu'un bien comme un autre... Plusieurs mois de tensions donc qui se sont accrues la semaine dernière pour se dénouer vendredi soir très tard, par le vote du Parlement européen, dont plus des deux tiers des membres ont voté contre l'inclusion, après une longue intervention de François Hollande, qui avait menacé de mettre son veto si le vote avait penché dans l'autre sens.

Victoire de la culture

Vendredi soir, la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) a donc été la première à dégainer dès que la nouvelle est tombée, se félicitant d'une décision "qui fait honneur à l'Europe [et] permettra de maintenir et de conforter les politiques mises en œuvre pour soutenir la création tout en les modernisant". Samedi, c'était au tour de la Société civile des auteurs multimédia (Scam) de se fendre d'un communiqué saluant "une victoire pour la diversité culturelle européenne" et les artisans de cette victoire, "particulièrement le président de la République, François Hollande, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, et la ministre du Commerce Extérieur, Nicole Bricq".

Tout n'est pas gagné

Les cinéastes signataires d'une pétition en faveur de l'exception culturelle se veulent eux plus circonspects, estimant que "tout n'est pas définitivement réglé" mais que la décision du Parlement européen constitue "un nouveau départ pour construire ensemble l'avenir, et notamment élaborer une économie durable et équitable de la Culture, à laquelle devront aussi contribuer nécessairement les géants numériques, aujourd'hui exemptés de toute responsabilité vis à vis de ce qui fait leur fortune." Lundi matin, la Société civile pour l'administration des droits des artistes et musiciens interprètes (Adami) se montre également précautionneuse, reconnaissant qu'"une étape déterminante a été franchie" mais pondérant aussitôt en rappelant que "la mobilisation doit être constante et notamment pour le G8 qui s'ouvre aujourd'hui".

La Sacem vise 2014

Enfin, la Sacem, qui avait initié sa propre pétition la semaine dernière et récolté plus de 500 signatures en très peu de temps (et même jusqu'à 4000 avant la décision du Parlement européen!),  s'est exprimée par voie de communiqué ce lundi matin. La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique dit ainsi son "profond soulagement" puisque "vingt ans après la reconnaissance de l'exception culturelle et sept ans après la ratification de la Convention de l'Unesco sur la diversité culturelle, l'un des instruments importants de politique culturelle de l'Europe et des Etats membres est donc préservé". Cela veut aussi dire que l'ensemble des politiques de financement de la culture ainsi que les quotas préférentiels pour les artistes locaux pourront être maintenus. Pour Jean-Noël Tronc, il faut aller au delà de cette décision, toute positive qu'elle soit et que les acteurs de la culture du Vieux continent développent "une stratégie positive et commune qui permette dès les élections européennes de 2014 de peser sur les orientations de l'Union Européenne en faveur d'un vrai agenda créatif."

Barroso mauvais perdant

Mais du côté des partisans de l'inclusion, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso se montre extrêmement mécontent. Dans une interview au International Herald Tribune, il estime ainsi que "certains [de ceux qui défendent l'exception culturelle, dont la France qui était au premier plan, donc, ndlr] disent être de gauche mais ils sont en fait extrêmement réactionnaires". Il va même plus loin, en jugeant que ceux-là "ne comprennent pas les bénéfices qu'apportent la globalisation [des échanges] y compris d'un point de vue culturel, pour élargir nos perspectives et avoir le sentiment d'appartenir à la même humanité». Et le président de la Commission de marteler "cela fait partie de ce programme anti-mondialisation que je considère comme totalement réactionnaire". Des propos extrêmement virulents dont n'a pas tardé à se saisir Pascal Rogard, directeur général de la SACD, sur Twitter, pour balancer quelques tacles à Barroso:

 

 

Et il n'a pas été le seul à réagit puisque lundi après midi, un hashtag #jesuisreactionnaire tournant en dérision les propos de Barroso avait vu le jour, semble-t-il à l'initiative de députés socialistes...

 

 

 

 

 

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