Tempête sur la musique, Jean-Noël Tronc répond et dit tout !
L’interview de Jean-Noël Tronc, tout juste nommé directeur général de la Sacem, publiée dans le Monde a déclenché de vives réactions dans la filière musique. Le nouveau venu attaquait dans cet entretien les bases connues du centre national de la musique, sapant les efforts de tous faits jusque-là. La musique apparaissait une fois de plus désunie alors que le nouveau gouvernement bataille ferme avec l’Europe pour imposer un système de financement pérenne de la culture. Ces dans ces conditions que l’intéressé revient aujourd’hui sur ses propos dans une longue interview. Concernant le CNM, il affirme ne pas vouloir remettre en cause la charte signée par la filière, Sacem comprise, lors du dernier Midem, et qui détermine la configuration des aides. Jean-Noël Tronc se montre d’ailleurs plus proche que jamais des points de vue des producteurs. Cependant, le directeur général de la Sacem avance toujours l’idée de proposer au CNC d’ »héberger » le CNM, dans un premier temps. Sur l’Hadopi, la riposte graduée en prend pour son grade, et Jean-Noël Tronc se montre favorable à la fin de la suspension d’internet mais aussi de l’envoi des sommations aux internautes. Sans parle d’un exercice de rétropédalage, Jean-Noël Tronc clarifie largement sa vision de l’action de la Sacem en interne comme à l’extérieur, et annonce aussi la présentation de son plan stratégique lundi prochain aux salariés.
ElectronLibre : Que reprochez-vous à la riposte graduée, exactement ? Est ce à dire que vous appelez à une refonte du système avec amende, sans sommation ?
– Jean-Noël Tronc, directeur général de la Sacem : Je lui reproche d’avoir créé une sorte de double peine pour les créateurs : d’un côté, elle leur impose une exception de fait à la règle générale qui est qu’à toute contrefaçon répond une sanction ; de l’autre, elle a créé un réel malaise dans l’opinion publique et fait passer pour attentatoire aux libertés un dispositif qui est plutôt attentatoire au droit des créateurs. Tout cela sans sanction prononcée à ce jour, et pour un dispositif complexe dont une partie reste à la charge financière des sociétés des ayant-droits.
La sommation, c’est quoi ? Si je suis pris à 57 km/h sur la voie sur berge à Paris, on ne m’envoie pas un email d’avertissement, on me retire trois points à mon permis et je dois payer une amende. D’un autre côté, on ne me confisque pas non plus ma voiture. D’où mon hostilité au principe de la suspension de l’accès internet au foyer dont les conséquences pourraient être tellement pénalisantes qu’il est probable en plus que pas un juge n’appliquerait cette sanction.
Refondre le système, c’est ce que le gouvernement a annoncé. La mission Lescure aura notamment ce rôle. Il est temps de prendre un peu de temps, de faire un vrai bilan, qui montrera que le système de l’Hadopi a eu une vraie utilité.
Mais je redis que à l’heure où près de 80% de nos concitoyens sont sur le net, une autorité de régulation chargée des relations entre créateurs et utilisateurs de biens culturels est une bonne chose, une chose légitime et nécessaire. Depuis que le Conseil d’administration de la Sacem m’a élu il y a six mois, j’ai été voir des sociétés sœurs de la Sacem dans 7 pays à l’étranger, avec à chaque fois des rencontres avec des créateurs mais aussi des industriels ou des médias. J’ai été frappé de voir le décalage avec le débat chez nous. Les gens sont réellement intéressés par le modèle français. Ils en voient les limites, mais aussi les avantages.
On a tellement diabolisé cette haute autorité qu’on oublie le sens de son acronyme : « pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet » ; « pour » et pas « contre » la diffusion des œuvres. Nos créateurs, nos éditeurs, ils se battent tous les jours pour que leurs œuvres soient plus diffusées. Moi qui me suis battu, dès que j’ai rejoint le cabinet du Premier ministre en 1997, pour la libre diffusion des données publiques, qui suis à l’origine de la création de Legifrance, qui est, aujourd’hui encore je crois, la plus grande base de données juridiques gratuite au monde, en inventant même la notion de « données publiques essentielles » qui doivent être libres de droit, je me sens très à l’aise avec ça.
Tout ce que je demande, c’est que l’on n’oublie pas le principe fondamental du droit d’auteur, qui est la liberté du créateur d’accepter ou de refuser la diffusion de son œuvre. Ce droit, c’est le premier de ses droits. Le critère de ce qui doit être sanctionné est donc, plus que jamais, le fait de diffuser l’œuvre d’un auteur sans son autorisation.
« J’ai contribué, avec d’autres, à éviter que cet excellent rapport ne devienne un enjeu d’affrontement gauche-droite »
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