Musique à la télé : « L’Année Bisexuelle »

La Sacem projetait hier soir en avant-première un ovni musicalo-télévisuel inventé et produit par Bertrand Burgalat et Benoît Forgeard. L’occasion de s’interroger sur la place décroissante de la musique dans nos lucarnes.

Mercredi soir, Jean-Noël Tronc ouvrait de manière « informelle » la séance spéciale de « L’Année bisexuelle » en rappelant aux artistes, politiques et sociétaires présents dans l’amphithéâtre Debussy-Ravel l’importance de la télévision dans l’écosystème musical. Un « bel enjeu » selon lui, qui se fait crucial puisque la place de la musique sur les chaînes hertziennes a baissé de 40% tandis que les films prendraient une place de plus en plus importante (une affirmation que ne manqueraient pas de contredire les différents hôtes des assises récemment organisées par le CNC). D’autre part, aux heures de très grande écoute, entre 18h et 23h, on compte 80% de films et de documentaires selon le président de la Sacem, contre seulement 14% de variété, catégorie à laquelle appartiennent les émissions musicales.

Donner sa chance à la musique

Il faudrait donc désormais mener « un grand combat pour la musique » puisque « les industries culturelles sont avant tout des industries d’offre » rappelle Jean-Noël Tronc, qui précise que la télévision reste un média prescripteur très important, notamment pour les 15-25 ans dont près de la moitié disent écouter de la musique précédemment entendue à la télévision. Pour imiter ce qu’il qualifie « d’effet vertueux des quotas radios », le patron de la Sacem aimerait donc que les chaînes de télévision se voient imposer des obligations de production et de diffusion de musique. Une idée que la ministre de la Culture Aurélie Filippetti a entendu lors du Midem le weekend dernier, et qui aurait gagné ses faveurs, à en croire Jean-Noël Tronc. Pour lui « on ne veut pas dire aux directeurs des programmes comment faire leur métier, on veut leur donner la chance de donner sa chance à la musique ! » Et d’en profiter pour balayer les protestations desdites chaînes de télévision qui jugent que la musique ne fait pas d’audience « il y a souvent des émissions musicales qui font 20 ou 22% de part d’audience ! ». Jérôme Bureau, ancien de chez M6 et président de Paris-Première depuis octobre 2012, profite de l’occasion pour dire sa fierté d’avoir dit "oui" au projet un peu fou de Bertrand Burgalat et Benoît Forgeard.

Show psychédélique

Puis la lumière baisse, les rideaux se ferment, et le public décolle pour une heure de spectacle musical hallucinogène. « L’année Bisexuelle », qui sera donc diffusé ce soir à 23h40 sur Paris Première n’est peut-être pas très « accessible », mais l’émission/film/ovni musical a le double mérite de faire rire et, surtout, de faire découvrir une multitude d’artistes français d’une manière complètement nouvelle. Images psychédéliques, saynètes d’humour complètement absurde, on a l’impression d’être dans la quatrième dimension ! Alors que l’offre musicale à la télévision se résume trop souvent à la même poignée d’artistes pop vus et revus sur tous les plateaux et sous toutes leurs coutures, ce concept donne à voir 12 artistes ou groupes extrêmement éclectiques. De l’organiste prodige au rappeur, en passant par des mélodies un brin gothiques ou de la pure chanson française, tout y passe, même le son yéyé. De quoi clouer le bec à ceux et celles qui reprochent à la musique française son manque de diversité. Sont également rassemblés des artistes déjà installés comme le vétéran Dick Rivers, Bertrand Burgalat himself, Barbara Carlotti, Marc Lavoine ou Lescop et d’autres, moins connus du grand public comme l’excellente Alice Lewis, le langoureux Jeff Barbara ou les très New Wave « Lescop ».

A défaut d’être très axée grand public, cette émission montre peut-être la voie vers une nouvelle façon de donner à voir la musique à la télévision. Et si les obligations souhaitées par la Sacem sont adoptées, il faudra bien que les chaînes comment à s’y pencher.

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