Apple a présenté un nouvel iPhone qui préfigure un tout nouveau marché, celui des objets connectés, dans lequel la firme à la pomme va s'emparer du rôle d'opérateur. Laissant aux autres les bénéfices d'une stratégie que l'on connait déjà avec iTunes Store et l'AppStore, ou encore les accessoiristes pour iPad et iPod. (Publié le 11 septembre)
Un nouveau continent émerge. L'internet des objets. Une appellation qui ne rend pas compte de la réalité de ce marché. Ce n'est pas de la connexion à l'internet des objets dont il est question, mais de leur place dans un univers où la connexion au Net, à un ordinateur, un smartphone, une console devient consubstantielle. Tous se connectent ensemble, mais tous ne se connectent pas au réseau des réseaux. La raison en est simple : pas utile.
La composition d'un réseau familier d'objets n'est donc pas une configuration telle des étoiles dans un ciel, éparses et dispersées, elle ressemblerait, plus à une nébuleuse ou une galaxie organisée, où les objets sont reliés entre eux, et gravitent autour d'un centre. Et celui-ci, ce sera Apple. La firme de Cupertino ne l'a pas dit explicitement, mais les annonces faites lors de la Keynote hier soir permettent d'en comprendre le schéma global.
Nouvel effet Halo
iPhone 5S est doté de deux éléments essentiels qui vont faire du smartphone haut de gamme de la marque l'équivalent du "trou noir de la voie lactée"; l'ordonateur de l'internet des objets connectés. Avec cet équipement, une puce capable de servir de moteur physique baptisée M7, et une connection iBeacon (déclinaison maison du Bluetooth), Apple place l'iPhone dans une position référentielle. C'est l'iPhone qui va gérer les éléments du réseau, leur data, leur fonctionnalité, et permettra de communiquer avec le Web, si besoin. La future iWatch sera certainement sur ce modèle - ce qui dans le principe n'est pas très éloigné de ce que Samsung propose avec Galaxy Gear.
Il est encore trop tôt pour savoir quels seront ces "objects" connectés. Est ce qu'il s'agira de montres ? Lunettes ? Bracelets ? Chaussures, ou tout autre chose ? Certainement un peu de tout cela, mais il faudra ajouter aussi la voiture, les lampes de son habitation, et plus si affinités. Tout ce qui nous entoure est potentiellement capable d'abriter une puce et une batterie miniaturisées qui communiqueront avec l'iPhone. Le marché domestique, celui de la santé et du fitness, de la domotique, etc., tous sont susceptibles d'être un jour ou l'autre concernés. Nike a montré la voie avec son application Nike+ lors de la Keynote.
C'est pour Apple la naissance d'un nouvel effet "Halo". Des objets compatibles avec les appareils iOS pourvus de ces technologies vont sans doute arriver sur le marché dans les prochains mois. Apple pourra profiter de leur dynamisme pour placer au centre de la toile son produit phare. Une fois encore, le matériel, le logiciel et la fonction vont embrasser le futur de la technologie sous l'égide de la pomme.
Séduire les masses
Le lien hiérarchique sera encore renforcé entre Apple, l'américain, et les autres sociétés. L'Europe a une chance avec l'Internet des objets, mais il lui manque tout le savoir-faire pour réussir à en devenir le leader. Et pourtant, le Vieux-Continent ne manque pas de pionniers dans ce domaine. Cependant, les bases de ces technologies font cruellement défaut en Europe : un système d'exploitation capable de tout accueillir, et une capacité à produire des appareils qui séduisent les masses. Ce retard ne se rattrape pas. Sûrement faudra-t-il attendre la prochaine révolution industrielle pour retrouver un espoir de leadership.
Le schéma stratégique d'Apple ressemble peu ou prou à ce qui se passe déjà entre la firme de Cupertino et nos industries culturelles (relire pour l'occasion "Les trois soeurs", et le premier épisode de notre série Internet Mytheux). Apple vient picorer dans les contenus que produisent les studios et les labels, les éditeurs et développeurs une part de la valeur en contre partie d'un ensemble de services : exposition, marketing indirect, accès à une clientèle, etc. Or, pour réussir à attirer des consommateurs, Apple a su mettre en valeur des contenus ayants une forte valeur pour le client. Ainsi, la musique, la vidéo ou l'information ont servi d'essence pour alimenter ce fameux "effet Halo". Avec les objets, c'est l'essence qui n'est pas encore identifiée clairement. Le Nabaztag avait misé sur le design et la communication, mais sans connaitre le succès grand public. Nike parie sur le sport et d'autres sur la "santé". Est ce que cela signifie que l'essence des objets sera essentiellement l'hypocondrie ou l'obsession du corps, la recherche de la performance ? Tim Cook, le Pdg d'Apple, adore les barres vitaminées, dit-on...