La victoire des producteurs de spectacles contre Google est totale : la Cour d'Appel de Paris confirme que le moteur de recherche ne peut pas vendre les mots clés "achat/vente, billets/ tickets et spectacle/concert"à des opérateurs non autorisés par les producteurs.
"Il s’agit aujourd’hui d’une décision majeure pour la défense des intérêts tant des consommateurs que des artistes et des producteurs de spectacles", se réjouit le Prodiss. La décision dont il s'agit est un arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 29 mars, qui confirme le jugement du 15 octobre 2020 interdisant à la régie Google Ads de vendre les mots clés "achat/vente, billets/ tickets et spectacle/concert" à des opérateurs non autorisés. Le syndicat de l'industrie du spectacle souligne que grâce à ces jurisprudences "les spectateurs ne pourront désormais plus être dirigés vers des sites non autorisés en cliquant sur des publicités illicites depuis la page d’accueil de Google."
Les arguments de Google
Pour obtenir ce résultat, le Prodiss a invoqué l’article 313-6-2 du code pénal, qui incrimine l’activité de commercialisation de billets de spectacle sans autorisation du producteur. Le syndicat estimait que cette disposition s'appliquait non pas seulement aux sites de vente de billets - contre lesquels plusieurs actions ont d'ailleurs été menées - mais aussi aux régies publicitaires des moteurs de recherche, et en particulier Google. L'idée du Prodiss était que la portée utile de l'article 313-6-2 aurait été fortement limitée si les sites commercialisant des billets sans autorisation pouvaient acheter des mots clés afin de vendre des spectacles en passant par Google Ads. Lorsque le Prodiss a entamé son action, en 2018, Google a argué qu'en tant qu'hébergeur, la société n'avait pas à s'interdire de vendre des annonces pour les billetteries, et soutenait que sa seule obligation était de retirer ces annonces après notification. Comme le souligne l'arrêt de la CA "La société Google France a répondu, dans un courrier électronique du 23 mai 2018, qu’elle n’adopterait qu’une «approche réactive en supprimant les annonces illégales dès lors qu’elles [lui] sont notifiées ». Selon cette interprétation du droit, il aurait donc fallu que les producteurs pourchassent chaque annonce illicite et en informe Google pour obtenir gain de cause.
Interdiction
Avec le jugement de 2020 et l'arrêt de la Cour d'Appel le confirmant, Le Prodiss obtient bien plus que ce que Google estimait dans ses arguments. Désormais, il est purement et simplement interdit à Google "d’autoriser l’achat des mots-clés achat/vente, billets/ tickets et spectacle/concert, au titre de son service d’annonces publicitaires « Google Ads », pour toute publication d’une annonce, destinée au public situé sur le territoire français, y compris dans les départements ou régions d'outre-mer et collectivités uniques ainsi que dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, aux fins de vente de billets de spectacle, à toute personne physique ou morale ne justifiant pas bénéficier de l’autorisation écrite du ou des producteurs du ou des spectacles concernés par l’annonce, et ce, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée."
Réparation
Par ailleurs, la CA octroie une réparation de 300 000 euros au Prodiss, là où le tribunal avait décidé de dommages-intérêts de seulement 40 000 euros. Il est intéressant de noter que pour augmenter ce montant, la Cour cite une étude du Centre National de la Musique établissant le chiffre d'affaires de la billetterie de spectacles de musiques actuelles en 2019 à 980 millions d'euros. Elle cite également une étude YouGov, montrant que 54% des Français achètent leurs billets de spectacles en ligne. La Cour d'Appel estime également que, contrairement à ce qu'avait décidé le tribunal, la société Google France devait être condamné et non pas seulement le société Google Ireland.